11 mars 2025

PRIER, C’EST…

 



Prier, c’est accueillir la main que tu me tends.

Seigneur, les crises, les angoisses et les tentations m’assaillent, mais je reste heureux et confiant car je sais que tu es à mes côtés. 

Seigneur Dieu, aide-moi à apprendre à accueillir la main que tu me tends.

Père tout-puissant, aide-moi à laisser l’Esprit-Saint remplir le vide en moi, pour qu’en lui je devienne le frère de ton Fils et que mon âme trouve enfin du repos.

Amen

Méditation pour le carême, La Croix

*****

Moi l’Éternel ton Dieu, je tiens ta droite. Moi qui te dis: ne crains point, je t’aiderai.

Ésaïe 41:13

8 mars 2025

VIS LE JOUR D’AUJOURD’HUI

 


Le jour de demain est à Dieu, il ne t’appartient pas.


Vis le jour d’aujourd’hui,

Dieu te le donne, il est à toi, vis-le en lui.

Le jour de demain est à Dieu, il ne t’appartient pas.

Ne porte pas sur demain le souci d’aujourd’hui.

Demain est à Dieu, remets-le-lui.

Le moment présent est une frêle passerelle:

si tu le charges de regrets d’hier, 

de l’inquiétude de demain,

la passerelle cède et et tu perds pied.

Le passé ? Dieu le pardonne.

L’avenir ? Dieu le donne.

Vis le jour d’aujourd’hui 

en communion avec lui


Trouvé sur une petite sœur du Sacré-Coeur, tuée en Algérie le 10 novembre 1995

communauté Sève, Lausanne 

5 mars 2025

RENDEZ-VOUS INTÉRIEUR

 


 « Continue, surmonte cette envie de t’arrêter. »

Là, dans le secret, je trouve mon Dieu. Il est ce souffle qui respire en moi et ce mouvement qui m’attire. Il est là, douce présence dans le silence de ce rendez-vous intérieur.

Montent les visages, les noms, les situations de tant de frères et de sœurs qui peinent à marcher, à tenir debout physiquement ou intérieurement, sous le poids de la douleur et des soucis. Pour eux, j’offre ce bout de chemin et je cours avec cette saveur particulière de la communion. 

Au cœur de mon effort, de ma fatigue, j’entends une invitation : « continue, surmonte cette envie de t’arrêter. » Au creux d’un souffle haletant, le souffle est là. Il libère un espace en avant de moi. Il m’offre une joie profonde, simple, gratuite… Allez, encore un peu, un peu plus loin, au rendez-vous du souffle de joie !

Ouvrons notre cœur aux appels de l'Esprit, même si cela implique de sortir de notre zone de confort.
Confions-nous à la présence de Dieu dans tous les aspects de notre vie.
Demandons-lui la grâce de persévérer dans la foi et dans l'amour.

Sr Marie-Théo Manaudou, dominicaine 
carêmedanslaville.org

4 mars 2025

LE CULTE DE LA PERSONNALITÉ



Nul ne peut se prévaloir de la volonté de Dieu.

Le culte de la personnalité est une pratique païenne qui vise plus ou moins à revêtir les simples mortels des attributs de la divinité. Nous en avons sous les yeux deux exemples inquiétants. Donald Trump il y a quelque temps et Vladimir Poutine cette semaine ont établi un lien de sens si ce n’est de causalité directe entre leur entreprise politique et la volonté divine, en se plaçant comme agents de la main de Dieu pour agir dans le monde, l’un pour sauver l’Amérique, l’autre la Russie. Cherchez l’erreur ! Dans l’Église, ces considérations sont bien balisées. En dehors de l’administration des sacrements, nul ne peut se prévaloir de la volonté de Dieu.

L’Église ne manque pas de sagesse dans sa relation à son chef. Même si nous devons rester vigilants, en particulier à cause de la pratique récente de canonisation des papes. L’habitude, si elle s’installait, de canoniser les papes nuirait au message porté par la papauté.

Il existe d’autres manières d’honorer la figure du pape, en se mettant à son école. Depuis le début de son pontificat, François insiste sur la détermination pastorale de son ministère. S’il est, de fait, en haut de la hiérarchie ecclésiastique, il sait se tenir en bas avec les plus délaissés et au milieu avec les communautés locales du monde entier. 

De manière qui n’est pas anecdotique, mais bien plutôt systématique, il multiplie les signes de désacralisation de sa fonction : petite voiture blanche pour se déplacer, simple chambre à la maison Sainte-Marthe en lieu et place des appartements pontificaux, chaussures de ville noires comme tout le monde mais aussi coups de téléphone directs à ceux dont il veut être proche etc., les exemples sont légion.

Toute cette simplicité fait de lui un être attachant, à qui on souhaite une longue vie et c’est bien cela qui compte : laisser grandir une forme d’amour entre lui et nous.

Arnaud Alibert, assomptionniste, rédacteur en chef à La Croix

27/02/2025

1 mars 2025

L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

 


Le terme d’intelligence appliqué à ce qui n’est que mécanique et artificiel, reste une tromperie.

Un lumineux professeur de théologie nous confiait que l’intelligence dans le discours commun n’est qu’une technique. Aux yeux de Dieu quand celui-ci se met à hauteur d’homme, quand il se fait homme de Galilée qui parle avec le tout-venant, l’intelligence est d’abord le tranchant d’une pensée qui sait saisir ce qui palpite dans l’homme et fait avancer le monde. Cette intelligence humaine ne se nourrit pas seulement de connaissances et de raisonnements ; elle puise aussi sa force dans les sentiments, dans l’exaltation de l’espérance, dans la profondeur de la confiance et de la foi dont l’humain est capable.

L’intelligence artificielle,elle, n’est qu’une algorithmique associée à de puissants calculateurs, capable d’analyser des millions de données en un clin d’œil, et de fournir des synthèses, des images et des sons. Elle est dotée d’une mémoire phénoménale, car elle a accès à des milliards de datas stockées un peu partout dans le monde. Et après ?

Loin de moi de la relativiser, d’en minimiser les risques ou d’en méconnaître les bénéfices dont l’homme pourrait en tirer pour sa santé, ses savoirs ou ses échanges d’informations. Néanmoins, le terme d’intelligence appliqué à ce qui n’est que mécanique et artificiel, reste une tromperie.

Non seulement, il manque à l’IA un corps qui ressente, mais surtout il lui manque cette faculté de pointer son énergie vers ce qui est inconnu. L’IA concentre toute son énergie à rassembler le savoir connu. L’homme, lui, a besoin d’inconnu et s’en nourrit. Cet inconnu est par excellence notre Dieu-Amour. La plus grande intelligence est une intelligence du cœur comme aimait le dire le cardinal de Lyon Louis-Marie Billé (1938-2002). Intelligence du cœur donc, mais pas un cœur artificiel, on se comprend !

Arnaud Alibert, prêtre assomptionniste rédacteur en chef à La Croix

26 février 2025

VERTUS DE L’ÉCHEC

 

Le Kintsugi japonais souligne les brisures avec de l’or

Tomber sept fois, se relever huit : quelles sont les véritables vertus de l'échec ?

Qu’il soit professionnel ou sentimental, un échec révèle que nos désirs ne deviennent pas toujours réalité. Il laisse une cicatrice douloureuse, dans une société marquée par la tyrannie de la réussite. Ce revers ne peut se surmonter qu’au prix d’un cheminement intérieur.

L’important n’est pas ce que l’on ne réussit pas, mais ce que l’on fait de cet échec…  

Zéro pointé, éliminé, disqualifié, refusé, largué, licencié, endetté… Cette litanie fait surgir des fantômes grimaçants : peurs d’enfant, rêves brisés, espoirs déçus. L’estime de soi, devrait toujours être dans le positif, même et surtout quand nous chutons. Or un échec trop humiliant ou une série d’échecs répétés viennent l’éroder. 

À l’ère de la performance, un déboire suscite en effet des émotions négatives fortes : honte, culpabilité, colère, etc.

Nul ne peut effacer, d’un coup de baguette magique, la négociation ratée ou l’objectif manqué. Un échec en soi n’a jamais de sens. Mais il fait partie de notre réalité. Il révèle nos pauvretés, nos misères, nos dysfonctionnements et ceux des autres… Le reconnaître est essentiel pour faire le deuil d’un idéal, préserver son énergie psychique, éviter d’en faire une obsession, voire d’arriver à un burn-out. Nommer le réel rend la situation plus intelligible. Comment est-ce que je considère mon échec ? À quoi je l’attribue ? À moi ou aux autres ? L’attribution peut en effet être interne (s’incriminer, parfois à tort ou à l’excès) ou externe (rejeter la responsabilité sur l’arbitre, le juge ou les profs). Dans les deux cas, il s’agit d’un biais cognitif qui empêche d’avancer.

« Vous pouvez le faire si vous croyez que vous le pouvez ! ». Quoi de plus violent sincèrement ? Jamais aucune pensée positive ne pourra effectivement combler le fossé qui existe, par exemple, entre les opportunités offertes à un ingénieur réputé et celles gagnées à la sueur de son front par un ouvrier lambda lorsqu’ils se retrouvent tous les deux sans emploi.  Ce mythe de la réussite par la fable de ses mérites, donc de ses souffrances. Tout le monde n’a pas les ressources financières, mentales et même morales pour se relever, sinon pour rebondir après un échec.

D’autant qu’un échec se mesure aussi à l’aune de sa dimension et de son intensité. Rater sa mayonnaise ou son créneau n’a pas la même répercussion qu’un mariage aboutissant à un divorce, un célibat non choisi, la stérilité, le suicide d’un proche… « On n’a pas de réponse à tout, accorde Lucille Garric, philosophe praticienne, ce qui montre nos limites, notre vulnérabilité, qui nous relient à notre humanité. Il existe des impasses qui, comme dans un labyrinthe, nous contraignent à faire demi-tour. Les stoïciens invitent à distinguer ce qui dépend de nous de ce qui ne nous appartient pas. Dans la relation, l’autre demeure une inconnue, un mystère insaisissable. L’acceptation, qui renonce à élucider le pourquoi, procure la paix de l’esprit. »

Par Stéphanie Combe

la vie.fr

23 février 2025

TÉNACITÉ DANS L’ÉPREUVE




La patience doit être l’expression de notre amour et le signe que nous nous abstenons de juger les autres. 

La Bible grecque utilise pour désigner la patience le terme hypomone, qui désigne l’action d’endurer quelque chose de pesant. La patience n’est donc pas une attitude passive. Elle est cette qualité qui nous permet de tenir bon, d’être tenace dans l’épreuve. Traverser ainsi les épreuves de la vie nous rend plus forts. « La tribulation produit la constance, écrit saint Paul, la constance produit une vertu éprouvée, la vertu éprouvée produit l’espérance » (Romains 5, 3-4). Celui qui supporte les tribulations de cette vie avec patience voit grandir en lui l’espérance que les épreuves feront place à quelque chose de nouveau et de beau. Mais l’inverse est également vrai : c’est parce que nous espérons que nous pouvons affronter et supporter patiemment les épreuves du quotidien : « Espérer ce que nous ne voyons pas, c’est l’attendre avec constance » (Romains 8, 25).

Le mot grec hypomone est traduit dans la Bible latine par patientia, qui vient de pati (« souffrir »). La patience consiste donc aussi à endurer la souffrance. Le stoïcisme loue la patience comme la vertu du sage qui reste fidèle à lui-même et ressort finalement vainqueur de ce qui l’accable. Les stoïciens nous invitent à faire la différence entre ce qui est en notre pouvoir – et que je peux changer – et ce qui ne l’est pas et que je dois supporter patiemment. Je ne dois pas m’épuiser à lutter inutilement contre ce que je ne peux changer, mais je tiens bon, je reste debout. Je reste moi-même. Nous avons chacun dans notre entourage des personnes susceptibles, jalouses, mal intentionnées. Quand il y a une personne qui nous agace ou nous blesse et que nous ne pouvons changer, nous sommes appelés à simplement la supporter. Non d’une manière passive et résignée ; cette patience doit au contraire être l’expression de notre amour et le signe que nous nous abstenons de juger les autres. 


ANSELM GRÜN, moine bénédictin 

prier.fr

20 février 2025

« DIEU VIT QUE CELA ÉTAIT BON » Genèse 1, 25

 


Le « judéo-christianisme » accusé de tous les méfaits de la civilisation industrielle

Certains critiquent le « judéo-christianisme » allégrement, l’accusant de tous les méfaits de la civilisation industrielle et de l’économie libérale sur l’environnement. On dit souvent en effet : voilà les fondements de l’attitude de l’homme européen et américain. Leur Dieu leur dit de régner, de soumettre la terre, de la dominer, alors il ne faut s’étonner de rien et surtout pas qu’ils aient mis en pièce la planète pour leur seul profit. Ils sont justifiés par leurs textes sacrés. Ce sont ces textes sacrés qui sont les responsables !

 Mais les pourfendeurs du judéo-christianisme, c’est clair, ne retiennent ici que ce qui les arrangent du texte biblique, car Dieu ne dit pas seulement de régner, de soumettre, de dominer, Il dit aussi comment il faut le faire : « faisons l’homme à notre image » et pour être sûr d’être bien compris il le répète trois fois en deux versets. En effet, si l’homme doit régner sur la création, la soumettre et la dominer, c’est donc en tant qu’image de Dieu, de ce Dieu qui vient de créer, pas de détruire, qui trouve cela bon et beau, le mot « tov » en hébreu veut dire les deux à la fois, et qui l’a répété à chaque étape de la création.


centre-Béthanie.org: Prêtre orthodoxe, mcentre-bethanie.org de la communauté de Béthanie. Pascal Sauvage : Prêtre orthodoxe, membre de la communauté de Béthanie.

17 février 2025

« NE PRENEZ RIEN POUR LA ROUTE »

 


Nous n’avons pas besoin de bâton, notre seul appui sera la certitude de sa présence.

Dans la vie religieuse comme dans le monde du travail ou des associations, chaque nouvelle mission est accompagnée d’une feuille de route. Celle que Jésus confie aux Douze est aussi la nôtre si nous désirons faire de notre vie une annonce de son Royaume. Attention : n’oublions jamais que c’est en son nom que nous partons. Celui qui compte sur ses propres forces pourrait bien vite se décourager ! Dépouillons-nous de toute fausse sécurité. « Ne prenez rien pour la route », nous dit Jésus. Nous n’avons pas besoin de bâton, notre seul appui sera la certitude de sa présence. Notre pain, sa Parole et son Eucharistie. Notre richesse, son amour.

Les pèlerins qui ont fait cette expérience d’abandon dans la pauvreté sont nombreux à revenir émerveillés de la sollicitude de la Providence, tout au long de leur route. Ils racontent la générosité des personnes rencontrées, la qualité de l’accueil qui leur est réservé. Leur vulnérabilité touche les cœurs et ouvre la porte à de riches dialogues en vérité. Nous recevons à la mesure de notre confiance, et lorsque nous avons les mains vides, c’est Dieu lui-même qui se donne à travers nous.

Soeur Marie-Laetitia Youtchenko, dominicaine

*****

La foi nous dit que Dieu est créateur et qu’il est sauveur. Entre le deux, il est ce marcheur avec nous. Cette marche n’est pas une simple visite. La foi nous indique qu’elle est transformante. N’en déplaise aux puissants qui s’enorgueillissent de leur victoires, c’est elle qui écrit l’histoire des hommes au quotidien. 

P. Arnaud Alibert, assomptionniste

La Croix.

14 février 2025

NIETZSCHE & CO.


Le dieu romain Jupiter


Pourquoi tant de philosophes se sont-ils opposés à Dieu ? 

Pour aller rapidement, on pourrait répondre : pour libérer l’homme. Ainsi, dans le Gai Savoir, Nietzsche écrit : « Nous autres philosophes et “esprits libres”, à la nouvelle que “le Dieu ancien est mort”, nous nous sentons illuminés d’une aurore nouvelle ; notre cœur en déborde de reconnaissance, d’étonnement, d’appréhension, d’attente. Enfin, l’horizon nous semble de nouveau libre, en admettant qu’il ne soit pas clair, enfin nos vaisseaux peuvent de nouveau mettre la voile… »

En lisant ces auteurs, on a le sentiment que Dieu constitue une chape de plomb qui oppresse l’humain. Les questions que l’on peut alors se poser me semblent être les suivantes : quelle image leur avait-on donnée ou se faisaient-il de Dieu ? « Marx, Nietzsche, Sartre, Camus, tous ces grands talents, tous ces grands hommes, chacun à sa manière, pourquoi refusent-ils Dieu ? », se demandait le prêtre Maurice Zundel en 1960. « Dieu, ils le voient toujours sous l’image du Pharaon, comme une limite à l’homme, comme une menace contre l’homme, comme un interdit, comme une défense, comme une barrière ! » Or, poursuit ce mystique, le Dieu des chrétiens ne doit pas être vu comme une limite, une menace, un interdit ou une vengeance, mais comme l’amour agenouillé qui attend éternellement le consentement de notre amour. C’est donc parce qu’ils avaient une image pervertie de Dieu que ces auteurs se sont révoltés contre lui. À nous de révéler par nos paroles et par nos actes le vrai visage de Dieu. 

Patrice Gourrier, prêtre et psychologue 

Rubrique courrier des lecteurs, prier.fr mars 2022

11 février 2025

LE DIEU DES ABÎMES

 



Il n’est plus là où on l’attendait ; ni devant, ni derrière, ni à côté…Il est en-dessous.


Je me rappelle un moment particulièrement fort de ma vie. Je me trouvais dans un hangar à bestiaux au Mexique, aménagé pour accueillir les Indiens coupeurs de canne à sucre et leurs familles durant la saison de la coupe. J’étais partie vivre avec eux quelque chose de leur quotidien. Vrai défi pour l’être que j’étais, encore façonnée de vie confortable et loin de la brutale réalité des plus humbles de cette terre. La première nuit, je m’étais demandé quel sens pouvait bien avoir le fait d’être là. J’avais fini par entendre, un peu désorientée dans ce noir épais de la nuit mexicaine, que le Dieu qui se donnait à voir était le Dieu des abîmes. C’était la première fois que je le rencontrais. J’étais un peu déconcertée par ce Dieu qui semblait ne pas avoir renoncé à accompagner le moindre atome de sa création, fût-elle la plus méprisée, la plus redoutée, la plus perdue au bout du monde. Le surgissement de ce Dieu qui ne déserte aucun des lieux si oubliés des hommes m’avait tellement émue que j’en éprouve encore, en l’évoquant, une sensation quasi physique 

Je ne m’étais pas dit à l’époque qu’il s’agissait du Dieu des abîmes, mais aujourd’hui c’est bien ce nom-là que je lui donne. C’est le Dieu des enfers, des lieux marécageux, des zones interdites et des silences de l’épouvante. C’est aussi le Dieu du Samedi saint, celui qui ne se donne plus à voir pour mieux se donner à entendre. Celui qui a disparu de nos écrans radar et de nos GPS. Où est-il donc passé ? Il n’est plus là où on l’attendait ; ni devant, ni derrière, ni à côté…

Il est en-dessous.

Oui, en-dessous comme une pierre de soutènement, mais aussi comme un berceau qui accueille l’enfant, une main qui soutient le bras défaillant de la personne vulnérable.

Le Dieu des abîmes est un Dieu qui ne se voit pas, puisqu’ayant choisi d’être en-dessous il reste caché. Ce Dieu-là, personne ne me l’avait enseigné, ni au catéchisme ni dans les discours où encore tant de clercs privilégient un Dieu fort et exigeant en attente de notre repentance. Pourtant j’ose témoigner que j’ai vu et entendu que le cœur de Dieu est affecté par toutes les personnes que nous rencontrons. Quand j’ai douté du coeur de l’Humain et du mien en particulier, Dieu n’a jamais douté. Sans cesse il m’a invitée à oser descendre avec lui là où ça fait le plus mal, là où la honte, la culpabilité, le désespoir semblent à jamais devenus pierre. C’est là, au creux du creux que Dieu nous tient dans ses bras, qu’il nous appelle par notre prénom et nous console.

Je suis comme chacun de nous, les mains nues et l’âme vulnérable pour dire, à partir de ma seule expérience, la rencontre avec le plus humain dans l’Homme, Dieu lui-même.


Isabelle Le Bourgeois, religieuse psychanalyste, aumonière de prison


Le Dieu des abîmes À l’écoute des âmes brisées Ed Albin Michel 2020


Catacombes de Paris


8 février 2025

L’ESPÉRANCE




Je crois que l’espérance de l’au-delà confère une endurance et un courage au présent. 

L’espoir est ce qui permet de nous projeter, de nous donner des objectifs. L’accumulation des crises (géopolitiques, démocratiques, écologiques…) entraîne une perte des perspectives. Face à cela, ce qui est sûr, c’est que nous ne pouvons pas nous contenter d’une espérance facile, mais la véritable espérance ne l’est jamais. Il y a des épreuves qui sont tellement dures, abruptes, que nous n’avons pas la ressource volontaire de tenir debout. Là intervient l’espérance, qui est d’un autre ordre que le simple espoir de projection. Espérer, c’est une attitude résiliente par laquelle je choisis de rester ouvert à ce que Dieu me surprenne, lui-même directement ou par les personnes et les circonstances au milieu desquelles je chemine.

Dans la langue française, nous avons deux mots, « espoir » et « espérance », mais nous n’avons qu’un seul verbe : espérer. Il y a une sorte de mystère de l’endurance incroyablement résiliente, inventive, opiniâtre des humains, une réponse à quelque chose qui vient de Dieu dans le cœur de l’homme.

Le soupçon pèse facilement que l’espérance chrétienne serait une évasion qui dispense d’assumer sa responsabilité dans ce monde-ci d’une façon courageuse et entreprenante, en consentant à la part de lutte que cela suppose. Au contraire, je crois que l’espérance de l’au-delà confère une endurance et un courage au présent. Espérer revient à s’orienter résolument, malgré les incertitudes et les démentis, vers la possibilité du bien.

L’espérance n’est pas un acte simplement individuel.  Nous voyons bien que dans des situations humaines limites – dans la dépression ou à l’approche de la mort par exemple –, notre espérance peut défaillir et nous avons besoin d’être pris en charge par d’autres. Dans l’épreuve, je suis alors porté par l’espérance des personnes qui m’aiment, qui m’attendent, qui me sollicitent. Il y a des situations où le malheur rencontré est si profond qu’espérer consiste à se tenir au côté de celui ou celle qui souffre, dans une simple co-humanité, sans avoir de solution immédiate, sans même formuler une espérance qui serait alors inaudible. 

Emmanuel Durand, théologien et auteur de Théologie de l’espérance (Cerf), La Croix L’Hebdo 5/1/25

5 février 2025

FAIRE DU JOURNALISME UNE MISSION

 



Un travail de l’esprit et de l’âme des deux partenaires de l’information: le journaliste et le public

Faire du journalisme, une mission d’une haute exigence, qui engage un travail de l’esprit et de l’âme des deux partenaires de l’information : le journaliste et le public auquel il s’adresse.

Bien sûr, rendre compte de la réalité dans un esprit de vérité, bien sûr donner l’information qui aide à comprendre le monde et à envisager un avenir désirable pour tous. Mais, en plus, « voir les miettes de bien cachées même quand tout semble perdu ». Je me plais à voir là ce qui définirait dans le paysage médiatique actuel la contribution que doivent apporter les médias chrétiens.

Nous sommes tous concernés par ce défi, les journalistes dans leur travail, le public dans la gestion de son attention. Or, ce qui est particulièrement frappant dans l’époque que nous vivons me paraît être cette ambiance d’ultraoccupation où l’on ne semble avoir le temps que d’un secours minimum pour nos proches et nos lointains (alors, prendre du temps pour s’informer, vous pensez bien…) et une série d’attitudes qui s’apparente à du temps gâché. Peut-être faut-il nous redire à nous-mêmes que l’on ne comprend pas mieux l’humain en multipliant les informations sur ce que font les humains, mais en creusant le sens et les motivations de leurs actions les plus significatives. Il faut oser s’engager dans une forme de spéléologie de l’activité humaine, en prenant le temps de quitter la surface pour voir ce sur quoi reposent nos pieds. Cela n’a rien d’évident car cela réclame silence et paix intérieurs quand notre quotidien est pris dans un tourbillon de notifications.

Arnaud Alibert, prêtre assomptionniste, rédacteur en chef à La Croix

Chronique du 31/01/2025

2 février 2025

LA GRÂCE…


pour éclairer notre vie

Il est certain que toute vertu pratiquée au nom du Christ donne la grâce du Saint-Esprit, mais la prière plus que tout autre, parce qu’elle est toujours comme une arme à portée de main pour l’obtention de la GRÂCE.

St Seraphim de Sarov, sur la sagesse

hors-série prier.fr août 2010

*****

La grâce est faite pour éclairer notre vie, dans toutes ses dimensions, à chaque instant. Comme une lampe dans une pièce éclaire tout ce qui s'y trouve.
Éclairer notre vie, c'est décider d'aimer un peu plus, en commençant par s'aimer soi-même, pour la simple raison que Dieu nous aime. C'est aussi rechercher la bonne décision, nous laisser habiter et conduire par la sagesse de Dieu. C'est prendre des initiatives pour faire grandir le royaume de Dieu là où il n'est pas, et le défendre là où il est attaqué.

Fr. Benoît Delhaye, dominicain 
prierdanslaville.com

30 janvier 2025

« LA FOI DES DÉMONS »

 


Un culte bruyant, à la manière de ces divinités païennes

Comment se peut-il que la désignation véridique de Jésus comme "Fils de Dieu" soit le fait de personnes à l'esprit "impur" ? Leur attitude en effet n'est pas du tout au diapason de l'Esprit de Dieu révélé en Jésus. Ces personnes lui rendent un culte bruyant, à la manière de ces divinités païennes qui inspirent la fascination et la peur. On appelle ce comportement dévoyé : "la foi des démons". Car si les mots sont là, la foi authentique n'y est pas. Voilà pourquoi Jésus leur demande le silence. Mais si les porteurs de cette fausse croyance en Jésus ne savent pas ce qu'ils disent, leur manière d'être n'est cependant pas sans enseignement pour nous. L'esprit faux qui les saisit nous dit justement ce que n'est pas la foi. Elle ne consiste pas en mots seuls, mais dans l'engagement d'une vie en réponse à ce que les mots de la foi signifient. 

Certes, lorsque nous confessons nous aussi Jésus "Fils de Dieu", nous ne comprenons pas complètement encore la portée de cette déclaration. Mais notre confession de foi est valide, si en dépit des doutes et des errements, nous persistons à cheminer à la lumière des Évangiles dans le clair-obscur de la foi.

Fr. Pascal Marin, dominicain 

prierdanslaville.com

28 janvier 2025

UN OU DES „THÉOPHILE“ ?

« Tous ceux qui aiment Dieu « 

Luc 1, 1-4 ; 4, 14-21 Luc dit « écrire pour » Théophile. Il serait étonnant que la vie de Jésus, dont Luc cherche à montrer la solidité des enseignements, s’adresse àun seul bénéficiaire ! Clairement ce prénom à l’étymologie signifiant tous ceux qui « aiment Dieu » et le cherchent avec intelligence et cœur renvoie à tous les lecteurs de tous les temps ! Mais le fait de parler à quelqu’un est une invitation à entendre un appel personnel à écouter chacun. Est-ce que j’accepte d’être le destinataire privilégié de cet écrit et de me laisser déplacer ? Il s’agit de passer du Jésus historique, ancré dans la temporalité, au Jésus de la foi qui dépasse le temps ! En lisant les évangiles, est-ce que j’arrive à passer d’un Jésus figé qui répond à ma vision du monde à un Jésus ressuscité qui ne cesse de me déplacer ?


prieenchemin.org

25 janvier 2025

« EFFATA », OUVRE-TOI Mc 7, 28

 


Aucune infirmité ne peut empêcher la vie de jaillir.

Hommes et femmes handicapés sont ouverts à des compétitions sportives de haut niveau. Aucune infirmité ne peut empêcher la vie de jaillir. Il suffit juste de trouver des personnes qui y croient. C’est ce que fait Jésus lorsqu’il se met à parler à un sourd. Il croit que cet homme peut entendre malgré sa surdité. Jésus ouvre une communication que le mondecroyait impossible. « Effata ! » est un des mots qui résume le mieux « l’effet Jésus ».

Être suffisamment ouvert pour entendre quelqu’un me parler, ou plus précisément pour l’écouter sans l’interrompre, est un défi. Nous en avons tous fait l’expérience… 

Thierry Lamboley, jésuite

prieenchemin.org

23 janvier 2025

PARCOURS DE FOI

 



La foi m'a créé l’exigence de respecter les règles qui nous gouvernent, en esprit et en vérité. 

Un parcours de foi, ce n'est évidemment pas un chemin linéaire. Il y a à la fois ce qu'on a reçu, puis, à un moment donné, ce que l'on assume ou non, ce que l'on s'approprie personnellement ou pas. On ne croit pas de la même manière aux différents âges de la vie, même si l'on adhère toujours au même Credo. Il y a des temps d'apprentissage, des temps d'éloignement, des temps de redécouverte et d'approfondissement. Chaque cheminement est singulier, chaque être passe par des moments de lumière et d'obscurité, tout cela est très concret. 
Des moments de tiédeur, d'éloignement, il y en a eu, bien sûr. Aller à la messe ou participer à des exercices spirituels par habitude ou par envie parce qu'on y croit, ce n'est pas la même chose. J'ai vécu tout cela.

Ma foi chrétienne m'a créé des exigences particulières dans l'ordre du monde laïque. La première exigence, c'est d'être légitime dans ce que l'on fait. Cela peut paraître paradoxal de passer par la foi pour affirmer qu'il faut être professionnel et rigoureux. Mais pour moi, c'est ainsi. La foi m'a créé une autre exigence, celle de respecter les règles qui nous gouvernent, en esprit et en vérité. Ce qui veut dire respecter la déontologie professionnelle et s'abstenir des conduites prohibées, notamment par l'éthique. D'où une attention vigilante aux conflits d'intérêts, le souci de ne pas harceler ou discriminer…

Jean-Marc Sauvé, haut fonctionnaire, président de la CIASE


18 janvier 2025

SE METTRE EN ROUTE

 


"ll (Jean Baptiste) parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant…" Lc  3, 3


Incarné dans une histoire, cet évangile invite à plonger dans notre histoire. Une histoire où l’on se situe tantôt avec joie, tantôt avec douleur. Peu importe, tout compte pour Dieu ! L’essentiel, rappelle l’évangile est de se mettre en route, sans regarder dans le rétroviseur. Ressasser le passé, ruminer un présent non voulu, s’inquiéter d’un futur incertain, tout cela conduit irrémédiablement vers une attitude statique, voire mortifère. Jean donne une clé : se mettre en chemin, sans hésiter à quitter là où nous étions intérieurement ou physiquement. Accueillir la Parole, prendre de bonnes chaussures, parcourir avec entrain et joie le chemin de la vie avec tous nos outils spirituels pour rendre droits les sentiers : belle marche cette semaine!


Emmanuelle Huyghues Despointes, CVX

prieenchemin.com

15 janvier 2025

„ L‘ESPÉRANCE NE DÉÇOIT PAS “

 

alamyimages.fr

Cette vertu qui nous fait tenir pour vrai le bon qui devrait être.

L’espérance ne déçoit pas » (Rm 5, 5). À chacun d’en inventer les mises en œuvre. Pour ma part, je voudrais partager cette intention d’une belle année du « nous ». Que nos Églises étendent leur force de communion à toutes les réalités sociales de nos pays ; qu’elles inspirent autour d’elles des logiques de rassemblement. Partout on constate que l’individualisme libéral ne tient aucune de ses promesses de bonheur et de paix. Parler en « je » est certes nécessaire et juste ; mais ne parler qu’en « je » est une défaite. Le « nous » est toujours là, attendant notre concours personnel. C’est un enjeu majeur pour notre vivre ensemble en démocratie, comme pour l’épanouissement de tous nos appels intérieurs.

Nous avons peut-être fait cette expérience ordinaire en temps de fête de nous tenir près d’un feu. Au petit matin, l’âtre de la cheminée est couvert d’un tas de cendres. Cette vision dit-elle tout de ce qui est ? L’espérance vient ici dire à la raison que des braises s’y dissimulent encore. Rien n’est certain évidemment, mais cela pourrait bien constituer la vérité du jour nouveau. Pour filer la métaphore, disons ouvertement que « nous » est une braise qui peut rallumer le feu qui éclaire et réchauffe notre monde et que les ego qui prennent toute la place sur le devant la scène sont de la cendre qui volera au vent.

L’espérance est cette vertu – cette « force », en latin – qui nous fait tenir pour vrai le bon qui devrait être.

Arnaud Alibert, assomptionniste, rédacteur en chef à La Croix