24 octobre 2019

PAR DES CHEMINS OBSCURS





Avec une infinie confiance

 » Mon Père,
Je m'abandonne à toi,
fais de moi ce qu'il te plaira.
Quoi que tu fasses de moi,
je te remercie.
Je suis prêt à tout, j'accepte tout.
Pourvu que ta volonté
se fasse en moi, en toutes tes créatures,
je ne désire rien d'autre, mon Dieu.
Je remets mon âme entre tes mains.
Je te la donne, mon Dieu,
avec tout l'amour de mon cœur,
parce que je t'aime,
et que ce m'est un besoin d'amour
de me donner,
de me remettre entre tes mains, sans mesure,
avec une infinie confiance,
car tu es mon Père. « 

Prière d’abandon du P. Charles de Foucauld

*****

«  - De quel côté es-tu ? - Avec toi. »


S’il y a bien quelque chose qui nous surprend lors de la lecture de la Bible, c’est la liberté et la fraîcheur avec lesquelles ses personnages protestent, se fâchent avec Dieu et l’invectivent, ce qui ne suppose nullement une difficulté dans leur relation avec Lui. Sans doute parce que Dieu craint avant tout le silence et l’absence de communication de ses enfants, mais nullement leurs questions, ni leurs impertinences. Suivant en cela la vieille tradition d’Israël, où l’on note une absence totale d’autocensure au moment de parler avec Dieu (il suffit de rappeler Job), de nombreux personnages n’hésitent pas à s’opposer à Dieu, entrent clairement en conflit avec ses projets et parlent de Lui avec des images que nous considérerions aujourd’hui comme presque blasphématoires. Ils l’accusent de ne pas tenir ses promesses, de se comporter de façon ambiguë, d’être un ennemi des innocents. Ils l’apostrophent avec des formules comme «  souviens-toi de moi, occupe-toi de moi, manifeste mon innocence, châtie mes ennemis etc. » Ils Lui reprochent de les avoir abandonnés dans des situations d’ignominie, de honte, d’humiliation ou de déshonneur; ils Lui expriment ouvertement la révolte de celui qui se sent traité de façon injuste... Leur parcours de vie (qui est généralement aussi le nôtre) pourrait être décrit comme un arc unissant deux extrémités: le non et l’amen, et ces deux positions instaurent tout un itinéraire spirituel. Car, malgré les protestations, le désespoir n’a jamais le dernier mot: un Dieu silencieux et énigmatique les a conduits, par des « chemins obscurs », vers la terre de la fidélité et de l’obéissance, vers l’amen comme attitude vitale de reddition, de consentement et de confiance absolue. Comme si après avoir si souvent interrogé Dieu: « De quel côté es-tu? », ils avaient entendu la seule réponse qu’Il donne habituellement, même en pleine nuit: « Avec toi. »
Nous voilà invités à cette unique certitude, à cet abandon total de celui qui décide de se fier éperdument à l’Autre, de considérer son propre futur et les moments d’incertitude comme « son affaire », en s’abandonnant entre ses mains. 

Dolores Aleixandre, religieuse espagnole, enseignante universitaire 

in « Aux Portes du Soir », éd. fidélité 2016



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