Analphabétisme religieux ou neutralité ?
Il convient de s’interroger sur ce que serait une culture scolaire amputée par principe de ses dimensions spirituelles. Que resterait-il de l’histoire de France sans l’évocation des liens complexes entre l’Église et la monarchie, des débats de la nature et de la grâce à l’aube de l’âge moderne, de la volonté de la Révolution d’instaurer un culte civique ? Que resterait-il de la littérature si les références religieuses présentes chez d’innombrables auteurs étaient passées sous silence ? De la philosophie, si tous les auteurs ayant parlé de Dieu devaient être exclus des programmes ? Pourrions-nous comprendre les œuvres d’art qui peuplent nos musées sans références bibliques ? Et plus fondamentalement, existe-t-il une culture qui ne procède peu ou prou d’une interrogation métaphysique sur le sens de l’existence humaine ?
Une âme jeune qui s’éveille à la pensée a besoin du trésor amassé par l’espèce humaine au cours des siècles. On fait tort à un enfant quand on l’élève dans un christianisme étroit qui l’empêche de jamais devenir capable de s’apercevoir qu’il y a des trésors d’or pur dans les civilisations non-chrétiennes. L’éducation laïque fait aux enfants un tort plus grand. Elle dissimule ces trésors et ceux du christianisme en plus.
Après avoir mis en garde contre la tentation étroitement partisane de certaines institutions catholiques, Simone Weil vilipende les excès d’un laïcisme militant lorsqu’il exclut les "trésors" de toutes les grandes traditions spirituelles. Le mal est donc ancien, et je ne comprends guère que certains "laïques" puissent aujourd’hui s’enorgueillir de cet "analphabétisme religieux" si répandu et qu’ils nomment à tort "neutralité".
Xavier Dufour, professeur de culture religieuse au collège-lycée Stanislas à Paris.
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