LA VIERGE AU PILIER

LA PREMIÈRE D‘ENTRE NOUS

Nous sommes tellement habitués à ces mots, « Notre Dame». Un synonyme de « Vierge Marie », un préfixe de nom d’église, « Notre-Dame-de … » Or « Dame » a un sens. Une « dame », c’est une domina, une seigneuresse comme on l’eût dit en vieux français, une maîtresse, une cheftaine, celle qui possède une seigneurie et la dirige. Le masculin de « Madame », quand la statue de la Vierge du pilier de Notre-Dame de Paris a été créée, ce n’était pas le faible « Monsieur », c’était « Monseigneur ». Marie est donc la « Dame ». Debout, surélevée, droite ; couronnée d’une, couronne somptueuse et tenant de la main droite le lys qui signifie la pureté, mais aussi la royauté ; le même lys qui sert de sceptre au roi de France. Son manteau,est orné de passementerie ; la ceinture de sa robe, qu’on devine, resplendit de pierres en cabochons et de clous d’or.     Son visage est grave : l’expression de la majesté, au XIVe,siècle, passe cette apparente impassibilité, par ce regard d’une intense acuité qui ne trahit rien du mystère des sentiments. Marie est une reine, elle, la première d’entre nous, la première sainte, la mère du Sauveur.

Mais elle est aussi « Notre » Dame. Elle n’est pas si loin qu’elle serait inaccessible. Dans son corps, nous reconnaissons l’attitude de notre corps ; elle porte réellement un enfant qui a donc un poids et qui joue avec un pan de son vêtement, comme insoucieux des fidèles qui prient devant lui.

Par sa maternité, Marie est immédiatement accessible. Il n’est pas d’homme qui ne soit né d’une femme. Cette dame-là est nôtre, nous pouvons nous adresser à elle, nous remettre à elle. « Notre Dame » est d’abord une expression de confiance, de report (comme le disait Charles Péguy) à celle qui assume nos peines et nos joies.

Texte du Frère Yves Combeau, dominicain

Œuvre : Statue de la Vierge au pilier - 14è siècle

(Notre-Dame de Paris)