14 février 2024

UNE DIMENSION DE GRATUITÉ

 



S’arrêter et prendre rendez-vous avec une dimension de gratuité ouverte à la joie d’être, sans rien faire ni consommer. 

Oppressés par l’envie de posséder plus ou d’être autre, nous sommes souvent oublieux de ce qui est déjà là. Cette obsession, déclinée sur tous les tons de l’illusion du manque (« Je suis moins que… », « Si au moins j’avais… »), occulte tout ce qui nous est offert chaque jour, que ce soit la santé, le toit ou la parole, l’habileté… Pour sortir de cette situation sans issue, nous pouvons décider d’entrer dans ce que nous sommes appelés à être de toute éternité et pour l’éternité. Il nous faut prendre conscience que, aux yeux de Dieu, nous sommes aimés et aimables sans aucun mérite ! Il s’agit de fermer la porte aux voix mensongères qui nous jugent, nous méprisent et nous diminuent. On devient moins sujet à la tristesse, à la frustration et à l’insatisfaction. Le quatrième commandement ordonne d’observer le sabbat, en d’autres termes de s’arrêter et de prendre rendez-vous avec une dimension de gratuité ouverte à la joie d’être, sans rien faire ni consommer. Cet appel à marquer un temps vide permet d’entrer en résonance avec soi, sans objectif, sans projet, sans efficacité. Cela revient à sentir le murmure d’un souffle qui ne vient pas de nous, mais nous habite au plus profond. Il s’agit de recevoir ses qualités de la main de Dieu avec gratitude, docilité et parfois courage, au lieu de les refuser en désirant autre chose. Se savoir aimé de l’amour de Dieu, c’est apprendre à se connaître en vérité. Et ainsi déployer toutes ses potentialités. Nous sommes des êtres uniques, spécifiques et irremplaçables. « Nous naissons comme des originaux, mais trop de personnes meurent comme des photocopies », disait le bienheureux Carlo Acutis. Dans chaque être repose un trésor qui ne se trouve en aucun autre. « Tu as du prix à mes yeux, tu as de la valeur et je t’aime » (Isaïe 43, 4). Cet amour est donné en entier à chacun. Personne n’en est privé. Ce que reçoit l’un ne manque pas à l’autre. Chacun est aimé, attendu, appelé, nourri, fortifié, connu par son nom, dans ses besoins, dans son histoire. Cet amour donné gratuitement ne dépend pas de la réussite. Se laisser aimer ainsi rend inutile le besoin de prendre ce qu’a ou ce qu’est l’autre. S’enraciner dans l’être que Dieu donne est le fondement de la liberté et de la créativité.

 Catherine Aubin, dominicaine 

dans Mourir d’envie ou vivre d’amour ? (Artège)

Cet article est extrait du magazine Prier,

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