10 mai 2021

CULTIVER DES FLEURS DANS LA TEMPÊTE

 


Sans doute tous les poèmes sont-ils des prières…

Pour moi, la foi est une chose très privée, très intime. C’est aussi une question permanente. J’ai écrit un poème dont le titre est : Est-ce qu’on prie quand on écrit ?

Je pense effectivement qu’on s’adresse à quelqu’un, mais est-ce que ce « quelqu’un » est en face, au-dessus, à côté, en nous ? Je ne prie jamais dans les églises, mais un jour une amie m’a dit : « Tu dis que tu ne pries jamais, mais pour moi tu pries tout le temps. » Sans doute tous les poèmes sont-ils des prières…

Mon rapport à la foi s’enracine dans le sentiment que j’ai connu enfant à Noël : la messe de minuit, l’atmosphère de la crèche… En revanche, je n’aimais pas du tout les fêtes de Pâques, surtout le Vendredi saint avec ses couleurs mauves et noires, qui me rappelaient la mort de mon père. J’aime les christs romans en ascension, pas les christs espagnols souffrants.

La dimension spirituelle est essentielle, malheureusement elle est mal racontée. Elle est la propriété de gens qui en font trop. Dès qu’on parle trop de Dieu, ça me fatigue. Il ne faut pas faire de sa foi une vertu. Si c’est quelque chose, c’est un cadeau…

Ceux qui ont la foi savent que c’est comme une éclaircie, qui dit « tout est parfait ». Il faut être modeste avec la foi, il faut être humble, car c’est quelque chose de chimiquement subtil. C’est une grâce qui n’appelle qu’un merci. On n’a pas à enflammer le monde pour cela, mais à le murmurer éventuellement.


Yvon Le Men, poète breton

Extrait de l‘interview

La CroixL’Hebdo

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