« Désormais, vous n'êtes plus esclaves, vous êtes amis »
Le documentaire récent d‘Arte sur les religieuses abusées par des prêtres a eu un immense retentissement. Stupéfaction, dégoût, colère, honte, j‘ai éprouvé, comme vous, tous ces sentiments que vous avez partagés sur Croire. Beaucoup se sont étonnés, à juste titre, de cette obéissance servile dont faisaient preuve des jeunes femmes, à l‘égard de prédateurs auxquels elles n‘opposaient pas de résistance. Est-ce cela „ obéir à Dieu“ ?
Extrait de l’édito de Sophie de Villeneuve, rédactrice en chef
Extrait de l’édito de Sophie de Villeneuve, rédactrice en chef
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Des trois vœux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance, on a l'impression que celui-ci est plus difficile, parce que souvent on le caricature. On croit que l'obéissance consiste à dire oui à un maître, en courbant l'échine et sans avoir son mot à dire. Ce n'est pas ce que le Christ attend de ses disciples : « Désormais, vous n'êtes plus esclaves, vous êtes amis », leur dit-il dans l'Évangile de Jean. Mais ce sens de l'amitié nous mène très loin, notamment à entrer dans un chemin d'obéissance, ce qui veut dire très exactement à entrer dans un chemin d'écoute. En latin, ob-audire, qui a donné « obéir », veut dire se mettre à l'écoute d'autrui, autrui étant le Christ dans le cas d'un religieux.
L'obéissance à Dieu passe les médiations que la vie religieuse propose, notamment celle d'un supérieur. Mais un supérieur n'est pas quelqu'un qui écrase les autres. Le terme de supérieur est d'ailleurs ambigu, il n'est pas plus grand que les autres. Dans les abbayes, l'abbé est celui qui guide les religieux pour qu'ils suivent honnêtement la voie qu'ils ont choisie, de sorte que leur désir soit toujours aussi enthousiaste à la fin de leur vie religieuse qu'au début. Le supérieur n'est pas là pour écraser, mais pour élever.
Cela suppose d'écouter l'autre, et écouter l'autre suppose de parler. Il y a obligation de parler, de dire ce que je veux et pourquoi.
L'obéissance n'est pas une forme de soumission…La soumission n'est pas évangélique. Il ne s'agit pas de briser la liberté du croyant ou de l'homme. Aucune liberté, même celle de Dieu, ne peut briser la liberté qu'il a donnée à tout homme. Dieu apprend lui aussi ce qu'il en coûte d'entrer dans ce chemin de liberté. Dieu est en dialogue, en alliance avec l'homme, et régulièrement dans ma vie je vérifie où se situe cette alliance. Dans le oui du mariage comme dans celui de la vocation religieuse, il y a une somme de « oui » en demi-teintes et quelques « non ». C'est ce qui donne son prix au véritable « oui » qu'on n'atteindra que dans le face-à-face ultime.
Frère Sylvain Gasser, assomptionniste
dans l’émission de RND, Mille Questions à la foi
croire.la-croix.com
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