27 août 2018

LE BONHEUR EST UN DON



Le bonheur est devenu obligatoire. Il est le nouvel impératif catégorique. Il faut positiver. Ne pas être heureux, ne pas sourire en permanence est un signe pathologique qui met l’entourage mal à l’aise. Le bonheur est une question sérieuse, une préoccupation de tout instant. Il n’est plus une option parmi d’autres. (...) Il faut travailler à se rendre heureux. Pour y parvenir les méthodes et les techniques ne manquent pas.


Le champ religieux n’est pas épargné. À lire une certaine littérature, on pourrait penser que le chrétien doit vivre en permanence dans la louange. Traverser une période de désolation est spirituellement suspect. Cela voudrait dire que l’on s’est écarté de Dieu. Il faudrait alors redoubler d’exercices spirituels, comme autant de techniques pour retrouver le bonheur.


Le kintsgi (jointure en or) 
redonne vie aux céramiques brisées 
Image famillechretienn
Pourtant, les Psaumes mettent en scène des malheureux qui ne sont pour rien dans leur malheur. Ils n’ont pas oublié Dieu. Ils ont pratiqué la Loi. Ils ne comprennent rien à ce qui leur arrive. Ils pensent que c’est Dieu qui les a oubliés. Leur prière est une imprécation. Ils ne cherchent pas d’échappatoire. Ils osent laisser monter la révolte qui est en eux, quitte à éclabousser leur entourage.
Il n’en reste pas moins que la Bonne Nouvelle de l’Évangile doit nous rendre profondément heureux. Il ne s’agit pas de se complaire dans le tragique. Jésus console la veuve qui a perdu son fils. Mais il nous révèle que le bonheur est un don. C’est la joie profonde de la surprise quand ce que nous recevons dépasse largement le fruit de nos efforts. Parvenir au bonheur ne dépend pas de nous. La vraie joie est celle du matin de Pâques lorsque celui qui avait été vu mort sur la Croix vient à la rencontre de ses disciples.


Extrait du billet « Bonheur obligatoire »
P. François Euvé, jésuite, théologien, physicien
panorama juillet-août 2018

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