11 mars 2018

PASSIONS APAISÉES



Image d'après hozana.org

Amour et vérité se rencontrent,
justice et paix s’embrassent ;
la vérité germera de la terre
et du ciel se penchera la justice.

Psaume 85

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Dans le temps qu’on est outragé, ou lorsque la mémoire de l’injustice qu’on nous a faite est encore récente, on ne saurait exprimer les mouvements que la nature excite soit en l’âme soit au corps. Pour moi, je me représente une mer sur laquelle tous les vents sont déchaînés et qu’une horrible tempête agite et bouleverse en mille manières : tantôt elle s’élève jusqu’au ciel, puis elle s’ouvre jusqu’aux abîmes ; tantôt elle est poussée vers le bord avec tant d’impétuosité qu’on dirait qu’elle vient couvrir tout le continent d’un seul flot. Ce fut un grand prodige lorsque Jésus Christ se trouvant sur une mer ainsi agitée et ayant commandé aux vents et aux flots de s’apaiser, il se fit tout d’un coup un si grand calme qu’un moment après il ne resta pas la moindre trace d’un orage si furieux. 
Mais, à mon sens, la merveille est encore plus grande d’apaiser l’émotion du cœur qu’une injure a irrité. Un ennemi qui nous maltraite soulève toutes nos passions ; il excite la haine par celle qu’il nous témoigne, la tristesse par le mal qu’il nous cause, la honte et le dépit par le mépris qu’il fait voir qu’il a pour nous. Il faut qu’un chrétien, qui pardonne pour l’amour de Jésus Christ, arrête d’un seul coup, qu’il enchaîne, qu’il sacrifie à Dieu toutes ces furieuses passions.

Saint Claude La Colombière († 1682), prêtre et théologien jésuite
Magnificat 06/03/2018

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Pardonner, ce n’est pas oublier : les cicatrices restent longtemps ouvertes et douloureuses. Pardonner, c’est reconstruire. D’abord soi-même, en ne se laissant pas détruire par le mal qui nous est fait – à l’exemple du Christ sur la croix : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. ». Pardonner, aussi, afin que les autres ne restent pas écrasés par le poids de leurs fautes. Qu’ils se redressent, se relèvent. Qu’ils vivent.
Utopie ? Cela s’est passé en Afrique du Sud dans les commissions « Vérité et Réconciliation » après l’apartheid. De même dans la « justice restaurative », quand se rencontrent et arrivent à s’écouter des victimes et des coupables : admirable chemin de libération tant pour les uns que pour les autres qui leur permet de se « restaurer », de se relever.
Et quand nous pardonnons, en nous relevant les uns les autres, c’est le sanctuaire de Dieu qui est relevé, reconstruit en nous et entre nous. La sainteté nous habite et nous anime, faisant de nous le temple vivant où Dieu rayonne sa présence de vérité et de réconciliation. De nous, de chacun de nous.

Fr Gabriel Nissim
« Justice restaurative « 


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