15 mars 2018

CETTE NOUVEAUTÉ DU MONDE






Ceux d’entre nous qui sont devenus parents, grands-parents, oncles, tantes d’un nouveau-né, savent cette suspension émerveillée : tout devient de nouveau possible devant un petit homme tout neuf. Chacun de nous est cette nouveauté du monde, car chacun a sa manière unique de vivre, d’aimer, comme le ton de la voix, toujours singulier, la manière de rire, ou encore le style. Je ne crois pas possible d’approcher le mystère de la miséricorde de Dieu sans commencer par cette joie qui est l’autre nom de la miséricorde. Avant tout, définitivement, pour toujours, Dieu nous aime de cet amour confiant, ébloui. Lui qui est pur don, pure générosité, lui qui n’existe que de donner vie et joie à ce qui sort de lui, ne peut pas revenir sur ce qu’il a donné. À l’heure de la douleur, quand l’homme oublie son créateur, Dieu donne plus encore, et dans cet affaissement, dans ce vide qu’il devient, vidé de lui-même pour nous, nous pouvons contempler la transcendance de Dieu, son infini mystère, cette profondeur abyssale qui continue d’aimer, d’espérer et de croire en l’homme, à l’heure même où il trahit. Et pendant ce long silence, la joie inaugurale est comme mise en réserve en attendant que chaque génération la redécouvre, en vive, et la proclame, jusqu’à l’heure où tous, nous vivrons en Dieu de cette joie. On a coutume de penser la joie comme la conséquence du salut. J’aimerais la penser aussi, et peut-être d’abord, comme l’origine du salut. La joie qui est en Dieu, autre nom du don qui est le mouvement de l’Esprit en Dieu, n’est que de se répandre, de s’offrir, de se multiplier. Cette joie, la première manifestation de la miséricorde, prend sa source dans le salut offert par Dieu, mais plus encore, elle est la source du salut offert en Dieu. 

Anne Lécu, O.p., dominicaine et médecin de prison.
Méditation 
MAGNIFICAT 01/03/2018

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