(...) Dans ce temps de plus en plus virtuel où il est si difficile de se rencontrer réellement, c’est à dire de vivre une plénitude, où si peu de temps est accordé à la préparation et à la préservation de ce miracle qu’est une rencontre réelle, où tout conspire à nous faire oublier que la rencontre est le but même de notre vie (avec soi-même, avec l’amour, avec Dieu) et qu’il n’en est pas d’autre ; dans cette époque où le dialogue et la possibilité même de dialogue sont en voie de disparition, où des centaines de milliers de migrants, étrangers, effrayants par leur nombre et la radicalité de leur différence déferlent dans nos vies et dans nos villes, on ne peut plus faire l’économie du travail à accomplir pour accorder notre langage commun à cette vérité : je parle à Dieu lorsque je parle à un autre homme. Pourquoi ? Parce que cette invitation d’une présence divine, le respect et la joie dont cette vérité imprègne les paroles, recréent un espoir de fraternité, et le sauve chaque fois qu’elle est affirmée quelque part sur notre Terre. Comme la prière à Dieu, le dialogue recrée l’espérance, la seule encore capable de porter la Foi et la Charité dans leur traversée des mondes révolus. Comment ne s’accorderaient-ils pas ? la prière et le dialogue expriment le même désir d’une Présence et donc d’une rencontre.
Que serait un dialogue construit sur le mode d’une prière ? Une parole originelle et singulière qui ne peut être prononcée que par la voix humaine, et non par la voix des modes, des doxas, des mots d’ordre, une parole purgée de l’instant, du jargon économique, marchand et guerrier. Une parole qui attend une réponse réelle. Une parole réciproque et responsable, en vue d’une communion. Nul affrontement, mais un élan exigeant, frappé d’un grand courage – celui d’affronter à la fois sa réalité et celle de l’autre, et de les assumer dans la vie vécue. (...)
Christiane Rancé, écrivain
Extrait du blog: " L'autre " 13/09/2015
blog.pollen.croire.com
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