19 avril 2015

LA RÉSURRECTION DES MORTS



By Bernadette Lopez, "Berna"

LONG, LE CHEMIN DE LA FOI

Long, le chemin de la Croix, long, le chemin de la foi. (...) La foi ne vient pas à maturité d'un seul coup ; sa forme parfaite est au bout d'un itinéraire, et merci à Dieu si au départ elle est aussi volumineuse qu'un grain de sénevé. De plus, elle n'est jamais acquise comme un bien inaliénable : nous pouvons être croyants à 8 heures du matin et incroyants cinq minutes plus tard. En fait, on ne possède pas la foi, on la reçoit sans cesse. Elle suppose donc de notre part une ouverture permanente, qui n'est autre que la conscience de la présence de l'Autre, cette présence qui nous fait être. Nous avons cru avoir tué Dieu, et tant de nos contemporains imaginent en avoir fini avec lui. Or voici qu'il est là, Ressuscité. Pour les croyants, la mort définitive du Christ, Parole créatrice faite chair, équivaudrait à notre retour personnel au néant ; sa résurrection est garantie de notre « vie éternelle ».
Le mot « chair » est ambigu dans l'Écriture. Tantôt il désigne le corps humain, tantôt l'être humain tout simplement, comme dans les expressions « toute chair verra le salut de Dieu » ou « l'Esprit sera répandu sur toute chair ». Il peut désigner aussi, et cela arrive souvent, ce qui en nous s'oppose à l'esprit et lui demeure imperméable. (...) Cette insistance sur le côté charnel de la Résurrection (Jn 20) rencontre en nous de sérieuses difficultés. Déjà, les premiers chrétiens se demandaient : « Avec quel corps les morts reviennent-ils à la vie ? » (1 Corinthiens 15,35). Paul répond qu'il y a autant de différences entre le corps mort et le corps de la résurrection qu'entre la graine semée en terre et la plante dans sa maturité. Métaphore, bien entendu, mais qui a le mérite de donner l'image d'une continuité et d'une discontinuité liées. Le même devient autre. Jésus mange, garde ses plaies, mais il n'est plus soumis aux lois de l'espace et du temps. Nous voici invités non seulement à croire sans voir, mais aussi à croire sans concevoir. Nous ne pouvons ni décrire ni penser le corps de la résurrection. Et pourtant, il y a corps. D'ailleurs la nature est pleine d'images de la Résurrection : la succession des saisons, le sommeil et l'état de veille, etc. Passage des contraires l'un dans l'autre. (...) L'univers entier est pétri de résurrection cachée, secrète, prenant des formes diverses.
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Marcel Domergue, jésuite
Extrait de la méditation "Difficile naissance à la foi"
croire.com 

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L'homme moderne garde-t-il encore la capacité de croire en la résurrection ? Une telle idée fait-elle partie du "croyable disponible" de notre temps ? Le concept de résurrection n'apparaît plus, à première analyse, culturellement porteur de l'espérance humaine. La perspective rationaliste de notre modernité relègue volontiers cette idée au grenier des projections mythologiques du désir humain. Mais tout est-il dit par là ?
(...) La facilité étonnante avec laquelle l'homme d'aujourd'hui semble vivre sans s'inquiéter de la question de la mort risque d'être trompeuse. La superficialité n'est pas à elle seule une libération. Et l'étouffement ne donne pas à lui seul le sentiment d'une victoire. Plus précisément : la phénoménologie de l'espérance montre qu'il appartient à la nature de l'être humain conscient d'espérer par-delà la mort. [...] Cette interrogation sans fin de l'homme sur lui-même se traduit par les espérances portant sur l'au-delà de la mort et dont font partie aussi bien l'idée de l'immortalité de l'âme que celle d'une résurrection des morts. [...] La "vie par-delà la mort" ne peut plus être conçue sous la forme de l'immortalité de l'âme, mais seulement comme un autre mode d'existence de l'homme tout entier. Or c'est ce que contient l'image d'une résurrection des morts. L'homme sait qu'il va mourir et il vit son existence comme une contradiction tragique entre son destin inéluctable et son désir de vivre de manière absolue. Dans cette situation il ressent un besoin radical de salut que l'on peut définir ainsi : être sauvé, c'est vivre, vivre tout entier, vivre absolument, vivre heureux dans l'amour, vivre toujours dans une réconciliation définitive avec soi-même, avec les autres, avec l'univers et avec Dieu.(...) On peut donc dire que tout homme est habité par une espérance de sa propre résurrection, présente au fond de lui-même de manière incoercible. Elle est liée à notre "être-homme". C'est cette expérience qui nous permet de comprendre la résurrection de Jésus et d'y adhérer par la foi, puisque nous n'avons à notre disposition aucune expérience comparable. Il n'y a en effet pas de foi sans espérance, comme il n'y a pas d'espérance sans un minimum de foi.

Bernard Sesboüé, jésuite
Extrait de la méditation "Le mystère de la résurrection de Jésus"
croire.com

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