14 avril 2012

LES FRUITS DU DÉSERT



Abbaye cistercienne du Thoronet, Var, 12ème s., le cloître


En ces temps graves et dangereux qui sont les nôtres, temps d'angoisse et d'espérance entremêlées, que peuvent apporter les monastères? La paix? Le recueillement? Le silence? Le rythme de la prière, battant chaque jour nos récifs intérieurs comme les vagues d'un océan tranquille? Oui, tout cela. Et encore la découverte de soi avec soi-même,  la découverte d'une image que seule peut transfigurer l'Image divine recherchée, espérée, dans une quête impitoyable à l'illusion. L'illusion se donne si souvent pour l'illumination! 
En ces temps qui sont les nôtres, les monastères ne sont pas un refuge.
Ainsi que le désert, le monastère est le lieu de la densité spirituelle, faite moins d'extase que des grains d'un chapelet de fidélité, égrené durant toute une vie.  En cela réside, il me semble, "Dame Pauvreté", et, qui sait, peut-être "la joie parfaite". Ces mots se murmurent sur toutes les lèvres fidèles. Ils montent de tous les coeurs donnés, quels que puissent être les doutes, les intermittences du coeur, car la fidélité n'écarte pas le val de l'ombre, elle le dépasse, l'ayant traversé. Ainsi le coeur monastique est-il vraiment fraternel, en ce lieu il invite à goûter sa paix, cette paix austère et douce. Cette paix produit encore des fruits aujourd'hui, comme autour des monastères coptes établis en Égypte depuis quinze cents ans dans le désert de Scété. En Occident, chez nous, en France, il en va de même. Les monastères redeviennent - s'ils ont jamais cessé de l'être - l'âme du pays. Les monastères en sont la source vive; les lieux où s'expriment dans les inévitables changements des paroles d'espérance, de fidélité à l' espérance. 

Dominique Ponnau
Conservateur général du Patrimoine
Directeur honoraire de l'École du Louvre
in Les Amis des Monastères, n° 148, oct. 2006

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