4 juin 2011

DES PAROLES HABITÉES


Lac de Tibériade
Photo: Hanan Isachar
"Sur le lac, les nuits de pleine lune, j'ai maintes fois senti la présence du Christ monter dans l'odeur entêtante des orangers en fleurs. Le lac et ses alentours ont gardé l'ambiance de l'Évangile"
(Émile Shoufani, curé de Nazareth)

Il est des paroles habitées. Même à propos des petits riens de tous les jours, elles ne parlent pas pour ne rien dire. Elles ne touchent pas que notre tête. Elles demandent à trouver en nous leur espace. Secrètement. Amplement. Longtemps, elles font écho en nous. Elles ne nous arrivent pas sans un silence, une attention, une hospitalité du coeur. Que nous les proférions ou que nous les recevions, de telles paroles nous nourrissent. Les paroles de Jésus à son Père, prononcées devant ses disciples, sont de celles-là.
(...) Entre les mots de Jésus à son Père se trouve la présence cachée de l'Esprit. Il est le souffle de la parole consolante qui les lie. Ce même Esprit, cette haleine vive, ce souffle tout proche dont nous ne savons ni d'où il vient ni où il va, nous rappelle maintenant encore les paroles de Jésus. Il nous garde de les oublier. L'Esprit nous délivre des grandes peurs premières, celles de l'effroi d'être abandonné, lâché. Car il est la « divine douceur », la respiration qui accompagne l'irrépressible assurance d'être aimé, non abandonné. Là, nous pouvons habiter. Chez nous. En lieu sûr. Là, nous occupons la place où se trouvait Jésus, là où il demeurait, lui qui était « aimé avant la fondation du monde. »
(...) Cela se sait sans toujours se comprendre. Cela s'éprouve, cela est sans preuve, sinon celle de la venue au grand large de notre vie, sinon l'étonnement d'un apaisement. Parfois, la légèreté d'une joie. Pas d'autre preuve de l'invisible présence de Jésus que notre parole habitée d'un souffle. Pas d'autre preuve non plus que notre présence les uns aux autres.

Claude Plettner, rédactrice en chef de journaux pour le groupe Bayard
In „La Croix 21 mai 2001 (extraits)
cité par "croire.com", en ligne

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