13 janvier 2023

UNE PAIX VIVANTE

 



Une paix qui exige moins de nous de l’attendre que de la faire advenir. 


Si l’année 2022 a été pour nous, Européens, éprouvante, faisant resurgir brutalement dans notre imaginaire l’idée d’un basculement mondial dans la guerre de haute intensité, ce monde n’a en réalité jamais connu de répit. Pourtant, un peu partout, des femmes et des hommes  ont célébré Noël et accueilli cet enfant dont la Bible nous dit qu’il est le « Prince de la paix ». Est-ce bien raisonnable ?Sans doute faudrait-il nous entendre sur ce qu’est cette paix que nous attendons. Un état impassible des relations, immuable, qui descendrait sur la terre pour s’imposer uniformément ? Une telle tranquillité imposée, du moins dans ce monde, tiendrait sans doute plus de l’ordre que de l’harmonie, serait une sorte de « paix morte » comme il y a des natures du même nom… L’expérience montre que l’eau la plus parfaitement immobile n’est bien souvent que de l’eau croupie.

Non, la paix véritablement désirable ne saurait être qu’une paix vivante, celle qui respecte notre liberté humaine et, donc, qui exige moins de nous de l’attendre que de la faire advenir. Toujours fragile, dépendante de chaque bonne volonté, perpétuellement remise sur le métier. L’Évangile a pour cela une belle expression, trop sous-estimée à force d’être ânonnée : « artisans de paix ». Pour être béatitude, la concorde sociale comme la quiétude de l’âme réclament nos mains, notre temps, notre savoir-faire, l’effort du geste tellement répété qu’il finit par nous devenir instinctif, naturel. La mauvaise nouvelle, c’est qu’une telle paix n’est jamais gagnée de façon définitive ; la bonne, c’est que nous ne sommes en rien impuissants : elle commence ici et maintenant, dans les plus petites choses de nos relations. Elle n’a rien de naïf, et rien n’est plus exigeant.


Aymeric Christensen, directeur de la rédaction 

Hors série La Vie décembre 2022

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