Il s‘agissait se comprendre avec le coeur, car à Auschwitz, plus je sais moins je comprends.
Le P. Manfred Deselaers, Allemand, chrétien et prêtre, vit depuis bientôt 30 ans aux portes du camp d'Auschwitz, créé il y a 79 ans, le 27 avril 1940, convaincu qu’Auschwitz est une terre féconde parce qu’elle est un lieu de transformation, espérant que du lieu de l’horreur naisse et croisse une réflexion constructive et que le souvenir aide à résister au mal et à faire triompher l’amour.
Je ne peux pas assumer la responsabilité du passé. Je n’ai pas non plus un poids personnel qui aurait été lié à l’histoire de ma famille – mon père n’était pas SS. Pourtant, je me sens responsable des relations d’aujourd’hui entre les Allemands, les Polonais et les juifs. En rencontrant d‘anciens prisonniers d’Auschwitz, ou ceux dont les proches y ont été exterminés, j’ai senti que je voulais être avec eux, à leur écoute. C’était ma mission en tant qu’Allemand, chrétien et prêtre.
Je voulais essayer de comprendre. Pas seulement les faits historiques car il s’agissait aussi d’un mémoire de théologie. Je devais également mener une réflexion du point de vue de la foi. Il fallait trouver cette perspective de la relation de chaque homme avec Dieu. Le chef de camp Rudolph Hoess est né catholique et il est retourné, à la fin de sa vie, vers la religion catholique. Qu’est-ce qui s’est passé entre-temps dans sa conscience personnelle, en tant que chef d’un camp de la mort ? Je voulais tenter de le comprendre parce que c’est un chemin pour honorer les victimes. Mais il s’agissait de comprendre avec le cœur, parce qu’à Auschwitz, plus je sais, moins je comprends. Comment ce camp a-t-il été possible au cœur d’une Europe chrétienne ? Comment comprendre les actes de Rudolph Hoess sous l’angle de la foi ?
On peut y arriver en lisant l’Évangile sur le Jugement Dernier (Mt, 25, 42) :
« Car j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire …, chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait.”
Ici, on saisit quelque chose d’essentiel : la rencontre avec Dieu passe par l’homme. La voix de Dieu c’est la voix de l’homme. Cette rupture de la relation avec l’homme et finalement avec Dieu – car Dieu est dans le cœur de l’homme – c’est la clé du Mal.
Le souvenir d’Auschwitz ne doit pas nous rendre malades, mais plus humains. Il ne doit pas nous empêcher de tisser des relations, mais de guérir les blessures du passé. Quand la confiance s’installe, il y a des miracles. Grâce à Dieu, Hitler n’a pas eu le dernier mot. Aujourd’hui, à Auschwitz, nous avons l’espoir que c’est le pouvoir de l’amour qui aura le dernier mot.
P. Manfred Deselaers,
„J‘ai choisi de vivre à Auschwitz“ (extrait)
aleteia.org

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire