7 mai 2020

MESSAGES DES PÈRES DU DÉSERT





Les messages du silence

Autour de l’an 300, un mouvement spirituel promis à un grand avenir fait son apparition en Égypte. À la suite de saint Antoine le Grand, leur précurseur et leur modèle, de nombreux ermites s’enfoncent dans le désert pour y pratiquer la prière constante et une ascèse intense. Ces anachorètes vivent dans des grottes ou des tombeaux, jeûnent, veillent, gardent le silence. Ils semblent morts au monde et à ses préoccupations.
Pourtant, de partout, des croyants viennent chercher auprès d’eux un message de sagesse, de consolation, de guérison. Paradoxalement, plus ces ermites s’éloignent du monde, plus ils fascinent et attirent. Ce sont des êtres de communion. Autour d’eux se forment des cercles de novices et de disciples. Que savons-nous de ce milieu et de la spiritualité qui le caractérise ?
Écouter, même le silence
Une phrase suffit à en évoquer l’atmosphère : «Abba, dis-moi une parole.» Celui qui dit cela ne s’attend pas à recevoir de longs enseignements : il est en quête d’une étincelle, d’une direction à donner à sa vie. Car l’ancien, le «beau vieillard», n’est pas un professeur, ni un maître (le mot didascalos est presque absent des textes), mais un éveilleur et un guide. D’où le refus inattendu que rencontrent parfois ceux qui le sollicitent : Théophile, l’évêque d’Alexandrie de sainte mémoire, vint un jour à Scété. Les frères qui étaient réunis demandèrent à l’abbé Pambo de dire quelques mots à l’évêque pour l’édifier. Mais il répondit : «S’il n’est pas édifié par mon silence, il ne le sera pas par mes paroles.»
Des frères et des laïcs viennent trouver abba Félix et le supplient : «Dis-nous une parole». Mais l’ancien garde le silence. Ils le supplient longtemps. Alors, abba Félix leur dit : «Vous voulez entendre une parole ?». Ils disent : «Oui, abba». L’ancien leur dit : «Maintenant il n’y a plus de parole. Autrefois, les frères posaient des questions aux anciens et ils faisaient ce que les anciens disaient ; en ce temps-là, Dieu montrait comment parler. Mais maintenant, ils posent des questions et ne font pas ce qu’ils entendent. Alors Dieu a enlevé aux anciens le don de la parole, et ils ne trouvent plus quoi dire, parce qu’il n’y a plus de travailleurs». En entendant ces paroles, les frères gémirent et lui dirent : «Prie pour nous, abba !».


Sentences des Pères du désert, Abbaye de Solesmes
seraphim-marc-elie.fr

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