20 mai 2020

LA NOSTALGIE DE DIEU





L’homme aspire à quelque chose d’autre.

Plus l’homme avance dans la vie, plus évidentes sont pour lui les limites qui le cernent de toutes parts et le paralysent. [Pourtant] en dépit de l’expérience de ses limitations, de sa fragilité, de sa condition mortelle, l’homme aspire à quelque chose d’autre. L’expérience a beau essayer de le convaincre, il se répète toujours comme une incantation ces paroles : immortalité, éternité, esprit, liberté, joie. L’art qui révèle la tristesse humaine apparaît comme le porte-parole et l’interprète d’un rêve qui paraît irréalisable, d’une percée vers ce dont l’expérience humaine n’a pas la moindre idée. « Notre cœur ne s’apaisera pas, dit saint Augustin, tant qu’il ne te trouvera pas. » C’est cette tristesse et cette quête infinie de liberté que l’orthodoxie appelle la « nostalgie de Dieu ».
Dans un certain sens, le christianisme est conforme aux théories selon lesquelles l’homme s’avoue limité, déterminé. Bien sûr, dans le monde tel qu’il est, il n’y a pas de véritable liberté, et le sage a raison de considérer tout cela comme un rêve enfantin. L’enfance passe, la fête s’achève, et il reste le mur aveugle de l’activité quotidienne. Mais, atteste le christianisme, la liberté existe, la fête est possible, elle se célèbre déjà, et notre tristesse deviendra joie. Car la nostalgie est en soi preuve de l’existence de Dieu, d’un monde de joie, d’amour, de liberté, pour lequel l’homme a été créé et auquel, souvent même sans le savoir, il aspire.

Prêtre orthodoxe d’origine russe, Alexandre Schmemann († 1983)                                    Magnificat, méditation quotidienne 

Aucun commentaire: