La meilleur façon de le trouver est de cesser de le chercher.
Quand on dit « Je cherche Dieu », on est un peu « à côté de la plaque » car Dieu n’est pas un objet que l’on peut saisir. C’est la première chose qu’il faut désapprendre : vouloir faire de Dieu un objet. Dieu est pur sujet. Ce qui veut dire que la meilleure façon de le trouver est de cesser de le chercher, de le laisser me trouver, se manifester à moi par la voie d’une grande vulnérabilité. Cette inversion des perspectives est remarquable dans l’évangile de Jean lorsque Nathanaël dit à Jésus : « D’où me connais-tu ? On ne s’est jamais rencontrés, et tu sais tout de moi… » (Jn1, 45-51). La scène joue avec le verbe « voir » : venu pour « le voir », Nathanaël fait l’expérience « d’être vu », et cela le fait basculer en une reconnaissance exaltée. Des penseurs comme Maine de Biran dans le sillage de Descartes ont creusé la conscience de l’infini comme inhérente à la conscience de soi. Par voie de dépouillement et d’intériorisation, la perception par les sens cède la place à la prise de conscience de soi, et celle-ci, en s’effaçant encore davantage, accède à la grande conscience ou « conscience divine ». Or Dieu n’est jamais extérieur à la conscience de soi. Avoir conscience de Dieu se joue à l’intérieur de la conscience de soi. Dieu est intériorité souveraine. Qui s’ouvre à lui au fond de sa propre intériorité est rejoint par l’acte de la présence divine. Le chemin vers Dieu passe par l’intériorité. C’est l’expérience que fit par exemple le jeune Paul Claudel dans la nuit de Noël à Notre-Dame de Paris en 1886. Il y eut une déchirure intérieure où il reconnaissait «quelqu’un d’autre en moi plus moi-même que moi ». Saint Augustin nous a légué la grammaire de cette inversion merveilleuse :« Dieu m’est plus intérieur que ma propre intimité et plus sublime que mon point le plus haut » (Confessions, III, 6). On peut noter le double mouvement, d’abord de l’extérieur vers l’intérieur et ensuite une montée vers le dépassement de son propre sommet. Cet accès à l’invisible par l’intériorité est de l’ordre de l’expérience. C’est quelque chose que l’on redécouvre aujourd’hui comme fondamental.
Benoît Standaert, moine-ermite, bibliste et théologien.
„Voir l'invisible, une expérience intérieure“ (extrait)
croire.la-croix.com
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