Yves de Franciosi, ingénieur-baroudeur |
Cet ingénieur échappa à la mort dans le Sahara grâce à l’intercession de la Vierge.
Yves de Franciosi, ingénieur-baroudeur et ancien cadre de Michelin étale une carte de l’Algérie où il travailla de 1958 à 1963. Il entoure le grand Erg d’un coup de crayon et inscrit, au milieu de l’espace sidéral, un mot : « Panne ».
Sur le papier, ça n’a l’« Erg » de rien, mais ce désert représente la moitié de la France. Il est hérissé de dunes roulant à l’infini, dans un four qui grimpe à 55°. Ses blonds mamelons forment autant de couloirs où l’on s’égare. Des pistes cramées s’enlacent, se croisent, se perdent, et forment un labyrinthe magnifique et mortel.
« Nous avions choisi la période et le lieu les plus durs afin de tester nos nouveaux pneus “Sahara” », se souvient-il. Il part le 12 août 1961 afin de rejoindre le camp d’essai. Le 13 au matin, à 200 kilomètres de son point de départ et à 200 du point d’arrivée, sa Land Rover tombe en panne. « C’est l’effroi total. Sur cette piste, ne passe qu’un camion par mois, mais je viens de le croiser… Je n’ai que 40 litres d’eau, or on en consomme 20 par jour ! »
Yves se trouve vite à sec. « Les chances d’en sortir sont infimes. Je pense à ma femme, à nos trois enfants. Alternent des moments de panique, des larmes d’impuissance… » Le 14 août, chaleur étouffante et désespoir. Franciosi n’a plus d’eau. Il écrit une lettre d’adieu à son épouse. La nuit est aussi glaciale que les jours brûlent. Pointe l’aube du 15 août. « Je sais que je vais mourir ; mes forces me lâchent ; la tête tourne. Une inspiration surgit alors que je m’effondre : “Nous sommes le 15 août… L’Assomption !” Je murmure : “Ô Marie, ô Maman, ne m’abandonnez pas, j’ai confiance en vous”. Puis je perds conscience. »
Un rugissement, soudain, sur la piste. Délire d’un agonisant ? Ce n’est pas un mirage. Débouche un camion. Son conducteur aperçoit la Land Rover. « Il s’est arrêté, m’a chargé à son bord, et m’a conduit jusqu’au camp. Or ce chauffeur ne devait pas passer par là… La Vierge l’a dérouté ! » Il faudra quatre jours au mort-vivant pour être réhydraté.
Coïncidence ? Yves de Franciosi habite à deux pas de la rue Saint-Exupéry. L’aviateur-écrivain raconte dans Terre des hommes comment, accidenté dans le Sahara et mourant de soif, il fut sauvé par un Bédouin qui, au sommet d’une dune, se tourna en sa direction, l’éclair d’un instant, et l’aperçut. Le diable se cache dans les détails ; la Providence aussi.
Depuis, Franciosi estime avoir une dette envers le Ciel. Il a donné quarante-huit ans de sa vie comme bénévole dans l’humanitaire, et dix-neuf à sa commune comme maire-adjoint. Celui qui survécut à la mort transmet Celui qui est la Vie à ses frères les hommes. « Même si je ne suis pas éternel ! », rit-il. En ajoutant : « N’oubliez pas de prier Marie, surtout quand c’est désespéré ! »
Luc Adrian, essayiste
Extrait de son article „Yves de Franciosi, sauvé des sables“ 3 décembre 2015
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