Prendre du recul. Se décharger, se débarrasser de ce qui alourdit, de ce qui ligote. Accepter de faire une pause, de rejoindre quelque désert intérieur, un lieu qui éloignera un peu des bruits immédiats superficiels pour s'enfoncer plus loin, pour écouter plus loin. S'alléger par le jeûne, s'écarter au désert sont les conditions qui nous sont proposées pour nous mettre en marche vers une connaissance plus grande, une découverte plus neuve. À chacun de trouver son désert et son jeûne. Le plus souvent, on n'aura pas à chercher bien loin. Les rythmes de la vie, les encombrements émotifs, les préoccupations quotidiennes, et peut-être aussi la trop bonne chère, nous signalent très vite nos points de saturation.
Plus difficile est de savoir comment y faire une brèche. Rien ne s'arrête pendant le carême : ni la vie familiale, ni le travail, ni les soucis, ni les relations heureuses ou difficiles. Les soirs sont harassés, les fins de semaine trop courtes. Trouver la brèche pourtant, qui doit être à la fois accessible et attirante parce qu'elle correspond à quelque chose de profond et de vrai. Que ce soit sur un point limité ; que cela n'exige pas une volonté surhumaine mais un effort simple et juste. À être attentif à soi-même, on doit pouvoir trouver le lieu personnel de son désert et de son jeûne.
Et consentir à cela, si modeste soit-il, c'est déjà être poussé par l'Esprit, comme ce fut le cas pour Jésus se retirant au désert. C'est le signe d'une disponibilité qui ouvre sur le travail de préparation dont chacun a besoin pour entrer dans l'intelligence de Pâques. Le récit des quarante jours de Jésus au désert montre comment il a été confronté à lui-même, à toutes les sollicitations qui surgissent en l'homme lorsqu'il s'agit de décider de sa relation à Dieu. De même pour nous. Quand nous avons accepté de mettre en notre vie un peu de recul et de jeûne, dans l'espace libre ainsi ouvert, nous commençons à voir les choses autrement, à les éprouver autrement et peut-être même à en être éprouvés, parfois durement. Le désert n'est pas forcément le lieu du silence. Il est aussi le lieu où se laissent entendre les tumultes intérieurs rendus habituellement inaudibles par les bruits extérieurs ordinaires.
Soeur Régine du Charlat, auxiliatrice
Extrait de la méditation "Comment vivre le carême?"
croire.com 03/02/2015
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