3 avril 2013

BLEU, COULEUR DE LA VIERGE



Notre-Dame de la Belle Verrière,
13ème s.Chartres


Au-delà du désir d’éclairer lintérieur des églises, les vitraux répondent aussi à un impératif symbolique. Dès lAntiquité, la lumière est associée au divin (Égypte et Grèce antiques). Les réflexions de Platon sur ce sujet sont reprises notamment par Saint Augustin, qui adapte au christianisme ces pensées païennes. Dans un même esprit, labbé Suger insiste sur le rôle des vitres colorées. Pour tous ces théologiens, la lumière est une manifestation physique de Dieu sur terre, et les couleurs renforcent son caractère sacré. De plus, lorsque le fidèle entre dans l’église, il a limpression de se trouver dans la Jérusalem céleste, que la Bible dit bâtie avec des pierres précieuses, lesquelles sont imitées par le verre coloré. Les vitraux contribuent ainsi à rappeler au fidèle la présence de Dieu dans l’église et à élever son âme vers le monde céleste et spirituel.

Notre-Dame de la Belle Verrière se distingue des vitraux du XIIIe siècle par la couleur des habits de la Vierge, un bleu clair et limpide, le « bleu de Chartres », réalisé à base doxydes de cobalt. Aujourdhui oublié, ce savoir-faire spécifique sest diffusé avec les déplacements des artisans et a été mis en œuvre dans dautres édifices ( Saint-Denis, Le Mans). Méprisé par les Romains, le bleu devient à partir du XIIe siècle lune des couleurs nobles, notamment grâce à des innovations techniques (teinture) et à l’évolution de sa symbolique. Ainsi, le bleu du ciel divin, le bleu des armoiries des rois de France ou le bleu du manteau de Marie trouvent-ils leur place dans la société médiévale.

Les vitraux forment des supports dimages qui permettent aux fidèles, souvent illettrés, de connaître les récits bibliques et lhistoire des saints quils doivent prendre pour modèles. Dans le vitrail de Chartres, la Vierge est couronnée et se tient assise sur un trône, tenant son fils sur ses genoux. Ce type de représentation, où la Vierge apparaît à la fois en tant que reine du ciel et mère de Dieu, est appelé « Vierge en majesté ». Il sest dabord développé en Orient dans lart byzantin à la suite du concile d’Éphèse en 431, durant lequel la Vierge est reconnue comme mère de Dieu. Mais il faut attendre le XIIe siècle pour quil s’étende de manière significative en Occident, avec lessor du culte voué à la Vierge Marie. Les églises dédiées à Notre-Dame se multiplient alors, et les images de la Vierge à lEnfant prolifèrent.

Plus tard, dès le milieu du XIIIe siècle, cette représentation hiératique de la Vierge fera place à celle dune mère, pleine de tendresse et protectrice, intermédiaire entre les croyants et Dieu.

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