Le pire des matérialismes est le matérialisme religieux, qui est de faire de Dieu une menace pour l'Esprit: « Que vous le vouliez ou non, Dieu existe ! » clamait un prédicateur.
Comment se défendre contre cet écrasement métaphysique ? Si le matérialisme
signifie quelque chose, il signifie ceci : traiter l'esprit comme une chose. Le
pire des matérialismes, c'est celui-là : nous enfermer dans cette camisole de
force d'une morale à contre-courant qui nous met constamment en conflit avec
nous-mêmes en nous mettant en conflit avec Dieu. Dès que la morale se présente
sous cette forme, venant du dehors, tombée du ciel, d'un ciel situé derrière
les étoiles, cette morale apparaît comme une violation de la dignité humaine,
et l'homme éprouve le besoin de se défendre contre ce faux Dieu. Car le vrai
Dieu est le gardien et la caution de notre dignité. Lui que nous avons reconnu
sous les traits du plus pauvre, Celui qui n'a rien et qui est Dieu parce qu'il
n'a rien. Ce Dieu ne saurait nous imposer d'obligations parce qu'il est une
intimité pure, qu'Il n'a pas de dehors, qu'Il n'a prise sur nous que par son
amour et qu'Il ne peut nous joindre que par la joie du don qui appelle un don
réciproque.
Le Dieu de l'expérience augustinienne, celle que nous pouvons faire chaque
jour et à chaque instant du jour, est un Dieu éminemment personnel, tellement
personnel que c'est en Lui que nous devenons personne.
Maurice Zundel
In Dieu inconnu,
Editions du Levain, 1986
Cité par
croire.com
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