
Récemment, un ami m'explique, péremptoire :
"Dans toutes les religions, il y a une clé d'enfermement. Chez les chrétiens, c'est le péché originel". Qui d'entre nous n'a entendu ces questions : un péché dont nous ne sommes pas responsables pèse sur nous, change le cours de l'histoire humaine, suscite culpabilité et peur de Dieu Tout cela est irrecevable. Comment y croire ?
La doctrine du
péché originel ne doit pas être cherchée dans la Genèse, dans le récit du péché
d'Adam et Ève, mais plutôt dans la lecture que fait saint Paul de la Genèse.
Tous, nous appartenons à une humanité pécheresse, tous nous participons d'une
création qui ne fait pas bon usage de sa liberté, dès qu'elle en prend
conscience. Paul présente Adam comme la figure de l'universalité du péché de
l'humanité.
Adam ne doit pas
être considéré comme un individu historique, mais comme un être collectif.
Cette lecture est du reste conforme à la juste manière de recevoir les récits
des origines. Ils répondent aux grandes questions de l'homme. Ce sont des
récits "ontologiques" et non pas historiques. Ils ne disent pas : Un
jour, cela s'est passé comme ça, mais : Toujours, cela se passe comme ça.
Exemple. Vous demandez pourquoi les hommes parlent des langues diverses et ne
se comprennent pas entre eux ? Écoutez l'histoire de la Tour de Babel. Pourquoi
la mort, les douleurs de l'enfantement, la nécessité du travail pénible ?
Écoutez l'histoire d'Adam et Ève.
Mais cette
histoire va bien au-delà du registre des explications. Elle nous fait
comprendre d'abord que la bonté du monde est plus originelle que le mal. Elle
nous dit, en même temps, que le péché est toujours déjà là, que le péché est
d'origine. Que l'Adam, tout homme, est dès l'origine tenté de se rebeller
contre Dieu. De refuser l'Amour qui est son origine, pour se placer en rival de
Dieu, pour prétendre qu'il peut se donner à lui-même la vie et le sens de sa
vie, en dehors de la relation d'origine qui le fonde et le fait vivre. Le récit
de la Genèse nous révèle la nature de ce "péché d'origine" : il naît
de la méfiance de Dieu.
Saint Paul
s'étonne de cette présence du mal en lui, si profonde, de cette emprise des
forces du mal sur sa volonté et sa liberté : "Je ne comprends rien à ce
que je fais : ce que je veux, je ne le fais pas, mais ce que je hais, je le
fais. Le bien que je veux, je ne le fais pas et le mal que je ne veux pas, je
le fais". On pourrait dire que, pour Paul, le péché originel n'est pas un
article de foi, mais une donnée d'expérience !
Père Michel
Souchon, jésuite
croire.com
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