UN TEMPS HORS DE L‘ORDINAIRE

Le collège des Bernardins, lavie.fr

Cheminer dans la joie

C’est le temps de l’attente. Ce n’est pas une pause mais une préparation, c’est un temps pour faire le ménage, se faire beau, se tourner vers soi et son corps, et se préparer à la venue d’un Dieu surprenant. Il y a « un moment pour tout et un temps pour chaque chose sous le ciel » : « Il y a un temps pour pleurer et un temps pour rire, un temps pour gémir et un temps pour danser »  (Ecclésiaste 3, 1-12). Là, nous sortons du temps ordinaire pour entrer dans une période particulière, qui nous fait cheminer dans la joie en vue de la naissance d’un enfant ! « Réjouis-toi », un message adressé à la Vierge mais aussi à chacun d’entre nous.

Le temps sacré: des moments d’éternité 

Nous vivons en effet dans une société moderne qui est dans une logique d’accélération, dans laquelle tout doit être le plus efficace possible. Cela engendre une temporalité aliénante qui produit une crise profonde : nous n’avons plus le temps de rien, nous courrons constamment après le temps. La religion peut  apporter une autre échelle temporelle, le temps sacré qui repose sur un fondement autre: ce sont des moments d’éternité, en grec aïon. Parce que l’éternité, ce n’est pas lointain. Ce sont des moments de suspension du temps qui s’insèrent dans nos vies. Ils sont en lien avec ce temps si important dans la vie chrétienne, le kairos, le « bon moment », l’occasion d’une plénitude. Tout cela offre un apprentissage pour essayer d’éviter de se noyer dans l’accélération, des outils pour être attentif et en éveil à ce qui peut survenir. 

Des lieux qui proposent un autre rapport à l’espace

L’Avent est un temps de combat intérieur, justement parce que c’est difficile. Sans compter qu’il y a beaucoup d’attentes pendant la période de Noël, notamment familiales qui peuvent elles-mêmes être aliénantes. Les religions proposent des lieux qui aident, que l’on soit croyant ou non. Quand on entre dans une église, une synagogue, une mosquée, on sent que les lieux « parlent » différemment que les bureaux d’une société ou les allées d’un supermarché. En plus d’un différent rapport au temps, les religions proposent un autre rapport à l’espace. L’Avent nous invite à revenir à une certaine intériorité. Il s’agit de se préparer progressivement à l’hospitalité, à l’accueil de celui qui vient, qui parle et dialogue avec les créatures.

Le sociologue Hartmut Rosa et la théologienne Gemma Serrano, 

Collège des Bernardins, Paris, lavie.fr, 15 décembre 2023